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« La transformation ? Les petits pas font les grandes avancées »

23 juin 2021

La transformation est sur toutes les lèvres et s’affiche comme le graal de l’entreprise moderne qui souhaite rester dans la course. Ce changement de paradigme, à priori complexe, peut emprunter des voies simples, aux résultats rapides et concrets. La carte d’embarquement digitalisée dans le secteur aérien en est un exemple probant.


La transformation peut parfois inquiéter ou apparaitre comme un projet au pilotage complexe. Elle se révèle souvent comme beaucoup plus simple que cela.

Elle signifie avant tout une autre vision du service (ou de la vente) car elle ne s’inscrit plus dans une logique d’évolution incrémentale, d’optimisation : elle suppose une révision profonde des processus et par là même des métiers voire des organisations.

Par nature, ce n’est pas un « big bang » mais une succession des petits projets, des petits pas, aux résultats rapides et concrets, faciles à appréhender. Elle repose sur l’agilité qui suppose d’expérimenter (droit à l’erreur) et d’itérer avec en permanence la possibilité d’ajuster, poursuivre ou abandonner, sans impact majeur. Elle évite l’effet « tunnel » de gros projets (gestation longue, sentiment qu’il ne se passe rien pour les personnes extérieures au projet et finalement déploiement nécessitant explications, accompagnement, formation lourde, etc.). En interne, ces petits pas rapides deviennent de petites victoires collectives, créant un état d’esprit « gagnant », modifiant les postures et créant l’engagement, comme pour une équipe de sport co !

La transformation implique un changement qui apparait finalement comme « naturel » et évident avec une grande économie de ressources en temps et budgets.

Elle est souvent indissociable de la révolution numérique, qui par la simplicité et l’accessibilité qu’elle induit, rend le client acteur des processus (réalisant lui-même des tâches auparavant effectuées par l’entreprise) et transforme in fine la proposition de valeur.

LA CARTE D’EMBARQUEMENT DIGITALISÉE, UN VECTEUR DU CHANGEMENT

Un exemple tiré de mon expérience pour illustrer : l’enregistrement en ligne des compagnies aériennes.

Pour celles et ceux qui ont eu l’occasion de voyager en avion il y a une dizaine d’années, l’expérience des clients passait par faire la queue à l’aéroport pour obtenir son numéro de siège et négocier pour obtenir un hublot ou un couloir.

Aujourd’hui, chacun obtient sa carte d’embarquement via internet ou son mobile. Une évolution, majeure pour les compagnies aériennes, sans sentiment de rupture en interne, et incontournable pour les clients. Pas une grande innovation cependant, sauf que …

Au-delà d’une amélioration de l’expérience client (partir rassuré, sa carte d’embarquement en poche), elle a entrainé en « coulisses » de nombreux changements.

Un changement opérationnel requérant de l’anticipation, dans la préparation des vols par exemple (positionner un groupe de clients ou une famille avec enfants pour leur garantir de voyager ensemble) : faite la veille du départ, elle dû être avancée de 24h supplémentaires pour une compagnie comme Air France qui « ouvre » l’enregistrement en ligne à ses clients 36h à l’avance. Il s’est accompagné d’un changement économique (moins de personnel à l’enregistrement).

Évolution positive pour le client : en lui « donnant la main », on a également fait apparaitre ce qui restait « caché » : le plan cabine, lui permettant de choisir librement son numéro de siège. Il part serein et gagne le choix et le contrôle de son expérience de voyage. Côté entreprise, cela a signifié d’inverser les processus de « cachés » en « visibles » avec plus de transparence sur les règles. Une autre relation au client.

Donner le choix a également créé une opportunité de revenus : tous les sièges ne se valent pas en confort. L’affichage du plan cabine a permis d’en révéler la valeur et de proposer au client d’obtenir un meilleur confort de voyage moyennant supplément. Les compagnies américaines ont ainsi introduit sur les vols domestiques le choix payant entre hublot ou couloir (qui aime le siège du milieu ?), sauf pour leurs clients les plus fréquents (une façon intelligente de reconnaitre la fidélité). Et cette opportunité, avec la poussée des low-costs, s’est transformée en changement du business model des compagnies aériennes.

Cette carte d’embarquement digitalisée alimente depuis un cercle vertueux client/entreprise : pilier sur lequel s’agrègent, de façon intuitive pour le client, les documents indispensables au voyage à l’étranger (passeport, visa), elle fait preuve de résilience en répondant rapidement aux nouveaux impératifs sanitaires (test, vaccin).

DES MÉTIERS ET UNE ORGANISATION TRANSFORMÉS

Au-delà du client, cette digitalisation entraîna une importante évolution du métier des collaborateurs en passant d’une posture transactionnelle (j’enregistre un passager et son bagage) à une mission relationnelle orientée sur « accueillir » et « assister » et sur la résolution des problèmes clients complexes. Elle impliqua la définition de marges de manœuvre (empowerment) nouvelles et une responsabilité opérationnelle plus marquée : une approche plus commerciale basée sur l’intelligence du collaborateur en situation pour trouver des solutions.

De façon « évidente » pour tous, elle a permis la transformation de l’organisation du travail : redéfinition et partage des rôles dans l’équipe, orchestration de compétences différentes, implication pour communiquer et expliquer aux pairs. Ceci à la faveur d’un nouveau mindset basé sur une démarche de co-création client/collaborateur privilégiant agilité et expérimentation : celle-ci favorise l’engagement, avec des collaborateurs acteurs du changement et non spectateurs. Une action qui fait plus sens pour eux avec plus d’autonomie (on définit sa feuille de route…)

La transformation est au final source de nouvelles opportunités avec un triple « win » : le client, véritable levier, l’entreprise et les collaborateurs. Produire à moindre coût, générer de nouveaux revenus, être plus simple et plus satisfaisant pour le client, favoriser l’engagement de ses collaborateurs : une belle équation qui aide à trouver de nouvelles solutions dans un contexte de sortie de crise où chacun a été amené à se poser des questions et attend des évolutions.


Carole Peytavin est spécialiste de la stratégie marketing, de l’expérience client, de la transformation et de l’innovation digitale. Elle a notamment dirigé les pôles Marketing et Expérience client au sein du groupe Air France.

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